28 septembre 2017

La recette de la pâte à pizza (façon rape and revenge 70's) - [Hors-série#6]

 
Pour faire une bonne pâte à pizza, comme j'aime à les faire,
il faut :
une balance
un récipient
de la farine
de l'eau (gazeuse c'est mieux)
de la levure de boulanger
du sel
de l'origan

je mets environ 250 grammes de farine dans mon récipient
une pincée de sel
le sachet de levure de boulanger
j'y ajoute 30 cl d'eau gazeuse
je mélange...
je rajoute un peu de farine évidemment pour éviter d'avoir une pâte trop mouillée, trop collante...
j'ajoute l'origan,
je malaxe encore...
je rajoute encore un peu de farine,
faut savoir corriger le tir, par forcément coller au projet original...

Vous vous doutez bien, je vais pas rester là à vous parler de bonne bouffe, je vais également en profiter pour glisser un petit mot sur le cinéma... En l’occurrence d'un film qui essaie d'appliquer une recette, celle du genre "rape and revenge", et qui fut un moment durant (les années 70) un pôle d'attraction assez significatif du cinéma d'exploitation. Il a bien eu, entre autre, La dernière maison sur la gauche aux états-unis, et puis Elle s'appelait Scorpion au Japon, mais quid de l'Europe? Et bien parmi les titres les plus emblématique et les plus souvent cité, il y ce film suédois de Bo Arne Vibenus : Crime à froid, Thriller - a cruel picture en version anglo-saxonne, connu aussi sous le sobriquet de They Call Her One Eye et pour cause. En effet, Crime à froid nous narre les mésaventure d'une jeune femme de la campagne, muette pour cause de (accrochez vous) viol traumatique et incestueux, enlevé discrètement par un proxénète, si discrètement qu'elle réalise, sur le tard, qu'on a fait d'elle une accro à l’héroïne dont elle ne pourra se payer sa dose que si elle a bien et docilement travaillée, c'est à dire en se prostituant sciemment. Je vous passe les fausses lettres du ravisseurs aux parents de la victime qui, ensevelis sous la peine, finissent par se suicider, ainsi que les nombreuses scènes d'abductions toute plus dérangeantes les unes que les autres, pour lesquelles le réalisateur ne se refuse rien (dont l'infâmente utilisation d'un stock shot de film porno montrant une pénétration sexuelle en gros plan en plein montage d'une scène de viol) culminant avec l’horrible séquence d'énucléation de l’héroïne. Au passage, je vous déconseille vivement de taper le mot "énucléation" dans votre moteur de recherche si vous voulez en tant soit peu bien dormir se soir et surtout, plus généralement, gardez foi en l'humanité face aux atrocité que l'homme est capable concernant les animaux).

Je vous ai pas coupé l'appétit, j'espère...
Retour à la pâte. Quand elle est prête, saupoudrée-là encore un peu avec de la farine pour éviter qu'elle ne colle trop au récipient quand elle va gonfler et mettez là au sec, à l’abri de la lumière.
Un torchon par-dessus fera l'affaire.
Laissez reposez un certains temps.

Pourquoi je vous parle de ce petit film d'exploitation, aux qualités toutes relatives à son genre et son époque, à ses conditions de production et d'exploitation. C'est qu'en fait, en au-dessus même du fait qu'il reste un film de genre plutôt bien foutu et ( c'est difficile de le dire mais) divertissant, They call her one eye (de loin, le titre que je lui préfère) est surtout un pure objet de cinéma, en ce qu'il propose une utilisation plutôt spectaculaire du ralenti et surtout, pertinente, voir révolutionnaire de ce procédé  cinématographique aujourd'hui bien trop désué et factice, n'en déplaise aux fans des frères Waschowsky.

Sortez la pâte au bout de quelques heures,
couper la en deux et étaler là sur un lit de farine légers.
Servez vous de la farine pour éviter que la pâte ne colle à votre rouleau. Ne la travaillez pas trop pour ne pas qu'elle perde son ferment.
Une fois la pâte étalée, vous pouvez préparer les ingrédient de votre pizza.

Que se passe-t-il de si intéressant pour que les ralentis de They call her one eye soit l'objet de mes louanges aujourd'hui: d'abord, ils sont hypnotisant... Évidemment, après tout les déboire et l'impuissance de l’héroïne face à ses horribles tortionnaires, nous n'avons plus qu'une seule envi: qu'elle se venge aussi violemment qu'elle a souffert de tout ces affreux salauds, qu'elle les éradiques de façon aussi spectaculaire et efficace que l'emprise qu'ils ont eu sur elle une heure durant. Et c'est bien le principe du genre auquel They call her one eye appartient, puisqu'après le rape, par définition, y'a le revenge. Lentement, inlassablement, la protagoniste principale de l'intrigue va apprendre tout les mécanismes de la vengeance (les arts-martiaux, la conduite sportive, le maniement des armes à feu) avant de abattre de façon implacable, robotique, systématique, sur ses bourreaux. Et a chaque, fois, la séquence nous est INTÉGRALEMENT présentée (intégralement, j’insiste) sur le mode du ralenti, usant et abusant de ce procédé comme les "clients" du proxénète ont usés et abusés d'elle juste auparavant.

Mais alors, qu'est ce que ces ralentis ont de si géniaux, en dehors de leur aspect spectaculaire? Et bien, simplement, en procédant d'un ralenti extrême, faisant accompagné le procédé par une bande son aussi hypnotisante qu'interminable, avec des échos à ne plus en finir, Le metteur en scène redonne surtout un peu de crédibilité à son histoire, à son héroïne, et surtout à son actrice principale. C'est à dire, notamment dans la séquence ou elle affronte deux policiers et qui reste pour moi la séquence la plus emblématique du film, qu'elle est sublimée dans ses gestes alors même que, franchement, disons-le, la comédienne peine à rester crédible dans ses mouvements et sa maîtrise martiale. En fait, sans un procédé de ralenti, on obtiendrait presque un sketch avec cette pauvre femme entrain d'essayer d'apparaître forte et maîtrisée alors qu'en réalité elle semble vraiment peinée et pas à l'aise dans ses mouvements.

N'oubliez pas de variez les bases de vos pizza entre sauce tomate et crème fraîche.

C'est surtout que cette séquence intervient après une démolition systématique du personnage, de corps de son interprète, soumise à des aléas scénaristiques ultra douteux, atteint au-delà même du tournage par l'image elle-même, lui prêtant un corps qui n'est pas le sien pour mieux la souiller (le fameux plan de la pénétration inséré dans le montage), allant jusqu'à lui crever l’œil (et par-là en lui ôtant sa condition même d'objet cinématographique, l’œil étant par excellence cet objet poétique essentiel du cinéma).
Et puis, comme une renaissance, le rapport de force s'inverse, et si le metteur-en-scène semble avoir trouver un moyen pour sublimer l'actrice dans son incapacité ou son manque de crédibilité, c'est surtout le moment où le film devient l'allié du personnage, comme pour lui conférer de nouveaux pouvoirs, une présence, une incarnation qui finit, in extremis, à faire d'elle un pru objet de cinéma à part entière, voir le cinéma lui-même incarné.

Voilà, c'est prêt. La cuisson est faîte, il n'y a plus qu'a passer à table et à déguster.
Et n'oublier pas, They call her one eye et la plupart des films d'exploitation de cette époque, tout comme les pizza que vous venez de faire, c’est encore meilleur le lendemain quand c'est réchauffé. 


The call her one eye: IMDB
-1973- (1h 44min)
Avec Heinz Hopf, Christina Lindberg
Synopsis:
Frigga/Madeleine, a été agressée sexuellement pendant son enfance, ce qui l'a rendue muette. Plus tard, elle accepte d'être prise en voiture par un homme, Tony, qui fait d'elle une accro à l'héroïne et la prostitue en devenant son souteneur.

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